LE PARIS DE LA MODERNITÉ 1905-1925

Article publié dans la Lettre n°589 du 13 mars 2024



 
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LE PARIS DE LA MODERNITÉ, 1905-1925. Après «Paris 1900, la Ville spectacle» (Lettre 370) et «Paris Romantique, 1815-1858» (Lettre 484), voici une dernière évocation de la capitale, à une époque marquée par de profondes transformations dans tous les domaines. Le parcours est constitué de onze sections à la fois thématiques et chronologiques. Près de quatre cents objets sont présentés, non seulement des tableaux, dessins, photographies, sculptures, mais aussi des objets d’art de toutes sortes, des vêtements, meubles, décors et même des moyens de transport, inhabituels dans un musée des Beaux-Arts. Notons aussi, dès la première salle, la place accordée aux femmes dans cette exposition, montrant combien elles étaient importantes à cette époque qui va de la «Belle Époque» aux «Années folles» en passant par la terrible épreuve de la Grande Guerre.
La première section évoque le quartier Montmartre, populaire et excentrique, où les artistes étaient nombreux, en particulier dans le Bateau-Lavoir autour de Picasso, et fréquentaient des cabarets comme le Lapin-Agile, toujours actif aujourd’hui. La vie à Montmartre devenant plus chère, les artistes investissent alors le quartier de Montparnasse, au sud de la ville, où des cités d’artistes telles La Ruche ou la Cité Falguière les accueillent. Ils fréquentent des cafés qui existent toujours comme Le Dôme ou La Rotonde. Des œuvres de Picasso, Chagall, Lipchitz, Modigliani et aussi Natalia Gontcharova et Marie Laurencin, pour n’en citer que quelques-unes illustrent cette partie. Cette première section se termine par le scandale du Salon d’Automne 1905, avec les peintures de Matisse, Vlaminck, Marquet, Manguin, Derain et Camoin qu’un critique qualifiera de «Fauves».
Le Salon d’Automne n’est pas la seule manifestation artistique à Paris. Il y a aussi le Salon des artistes indépendants qui s’oppose au Salon des artistes français qui héberge, lui, les tendances officielles. C’est à cette époque, après le fauvisme, qu’apparaissent deux nouveaux courants. Le premier est le futurisme dont le manifeste est publié en 1908 dans Le Figaro. Des œuvres de Carra et Severini illustrent ce mouvement subversif qui entend, entre autre, glorifier la guerre, l’anarchie, les belles idées qui tuent et le mépris de la femme ! Le second, en 1911, est le Cubisme avec Le Fauconnier, de la Fresnaye et surtout Picasso et Braque. Ces derniers ne se reconnaissent pas dans le travail des premiers. Braque les nomme même les «cubisteurs».
La section suivante est la plus époustouflante avec un avion exposé au milieu de la salle, un Aéroplane Deperdussin type B de1911, de plus de huit mètres d’envergure. Il évoque le Salon international de l’automobile, du cycle et des sports qui se tient chaque année au Grand Palais depuis 1901. Nous avons aussi une bicyclette pliante et surtout une Automobile Peugeot type BP1 dite «Bébé Peugeot», torpédo, de 1913 classée monument historique. Ces engins faisaient l’admiration des centaines de milliers de visiteurs qui se pressaient dans ce salon, parmi lesquels des artistes, tels Delaunay ou Rousseau qui leur rendaient hommage dans leurs toiles.
Après le «Boum» des transports, on passe à l’habillement avec «Poiret le magnifique», l’homme qui a libéré la femme du corset, qui a inventé les produits dérivés, parfums, etc., qui a compris l’intérêt des nouveau médias pour sa publicité et a développé les arts décoratifs. Des robes, des flacons de parfums, des revues de mode, un paravent etc. montrent l’importance et l’inventivité de ce couturier au début du siècle.
L’exposition est essentiellement axée autour des Champs-Élysées où se tiennent les grandes manifestations de toutes sortes qu’elle évoque. Tout naturellement c’est dans ce quartier qu’est construit par Auguste et Gustave Perret, le théâtre du même nom, le plus moderne de l’époque. Il est décoré par Bourdelle, Denis, Vuillard ou encore Jacqueline Marval. Il est inauguré en 1913 avec le Sacre du Printemps donné par les Ballets russes, fondés par Serge Diaghilev, dont le danseur vedette est Vaslav Nijinski. Le public est choqué, faisant ainsi entrer dans la légende l’œuvre et le théâtre. On parlera du «massacre» du Printemps !
Mais en 1914, l’Allemagne déclare la guerre à la France. La sixième section évoque cette période dramatique avec des peintures, des photographies d’exposition de canons et d’églises bombardées, des revues, une bombe, etc. et même une capote de troupe conçue par Paul Poiret, qui n’eut pas le succès escompté.
Néanmoins, « loin du front, la vie reprend ». C’est le titre de la septième section. La vie culturelle est marquée par une exposition d’art africain et océanien, par la présentation en 1916 des Demoiselles d’Avignon de Picasso, par une exposition controversée pour atteinte à la pudeur d’Amedeo Modigliani, et aussi par la représentation au théâtre du Châtelet du ballet Parade. On peut voir deux des costumes extravagants conçus par Picasso et un extrait de la reconstitution de ce ballet en 2007. Cette section évoque aussi l’appartement de Picasso rue La Boétie avec ses tableaux et masques africains.
La paix revenue, les artistes du monde entier se ruent sur Montparnasse. C’est le début des «Années folles» marquées par une activité artistique, sociale et culturelle intense. On parlera de l’«École de Paris». C’est aussi à cette époque que le mouvement Dada arrive à Paris. Sous l’égide d’André Breton il donnera naissance en 1924 au surréalisme.  Des œuvres de Orloff, Foujita, Soutine, Man Ray, Picabia etc. illustrent cette période.
C’est aussi à cette époque que la mode se libère avec des tenues où les paillettes et plumes se prêtent aux nouvelles danses échevelées, comme le montrent les tenues de Madeleine Vionnet ou Jean Patou. Les premières créations de Cartier (bracelets, pendentifs, etc.) font leur apparition. On en verra d’autres plus loin.
Après une brève évocation du Bœuf sur le toit, un célèbre cabaret de l’époque, le parcours nous emmène de nouveau au théâtre des Champs-Élysées. Celui-ci accueille en 1920 les Ballets suédois puis, en 1925, la fameuse Revue nègre où Joséphine Baker fait sensation avec ses danses trépidantes. Des tableaux, des films, des maquettes, des poupées rappellent ces spectacles.
Le parcours se termine avec l’Exposition internationale des «arts déco» de 1925 où Jeanne Lanvin, vice-présidente de cette manifestation, exposait ses créations. On est toujours autant subjugué par cet art si différent de tout ce qui a été fait auparavant. Les pavillons d’Auguste Léon ou Robert Mallet-Stevens, les péniches de Léon, les portes de Lalique, Petit, Brandt, les sculptures de Bernard, Blondat, les Frères Martel, Pompon et surtout Landowski avec le Christ Rédempteur de Corcovado sont tous d’une très grande originalité. C’est sur des images de cette immense sculpture que s’achève cette brillante exposition, aussi instructive que passionnante, bénéficiant, comme toujours en ce lieu, d’une remarquable scénographie. R.P. Petit Palais 8e. Jusqu’au 14 avril 2024. Lien: www.petitpalais.paris.fr.

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