LE REPAS DES FAUVES

Article publié dans la Lettre n°580 du 25 octobre 2023


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LE REPAS DES FAUVES d’après l’œuvre de Vahé Katha. Adaptation et mise en scène Julien Sibre. Avec Thierry Frémont, Olivier Bouana, Jochen Hägele, Cyril Aubin ou Sébastien Desjours, Julien Sibre ou Benjamin Egner, Stéphanie Caillol, Alexis Victor ou Jérémy Prevost, Barbara Tissier ou Stéphanie Hédin.
Paris 1942. La capitale occupée n’empêche pas Victor Pelissier, libraire, et sa femme Sophie, de recevoir leurs meilleurs amis à dîner à l’occasion de l’anniversaire de celle-ci.
Restée veuve avec un fils, Françoise arrive avec Pierre, un ami qui a perdu la vue durant la Première Guerre Mondiale et de Vincent, prof de philo au lycée Janson-de-Sailly, bientôt suivi de Jean-Paul, le toubib. Ils attendent André, toujours en retard et ils ignorent si Max se joindra à eux. Ils sont ravis de se retrouver même si la réflexion de Jean-Paul : « La guerre est finie, le Maréchal a signé l’armistice » ne remporte pas l’adhésion de tous. Visiblement d’opinions différentes, ils sont bien décidés à ne pas aborder les sujets politiques.
André surgit enfin, fier d’apporter des vivres et produits de toutes sortes. L’industriel a vendu autrefois de l’acier outre Manche avant de se tourner de l’autre côté du Rhin. Les convives n’en croient pas leurs yeux. Comment rivaliser avec Fleur de rocaille de chez Caron lorsque l’on a eu tant de mal à dénicher comme cadeau une ou deux paires de bas ? André est également en possession d’une caméra. Tant pis pour Max. Il s’empresse d’immortaliser ce moment de convivialité.
Ils sont en pleine euphorie lorsque deux coups de feu provenant de la rue interrompt leur joyeux brouhaha. S’ensuivent une cavalcade de bruits de bottes dans la cage d’escalier, l’arrivée tonitruante du commandant Kaubach et l’annonce des représailles: deux officiers assassinés se soldent par vingt otages qui seront exécutés sur le champ. Dix-huit sont déjà rassemblés dans la rue, il en manque deux. Reconnaissant en Victor le libraire chez qui il se fournit, il module sa décision. Il donne aux convives deux heures pour terminer leur repas et leur laisse la tâche redoutable de désigner eux-mêmes les deux otages.
Comment peuvent-ils décider de la mort de deux d’entre eux ? Horrifiés, les amis réfléchissent, voulant tout d’abord rester soudés. Laisser le hasard décider, recourir à un colonel dont Jean-Paul a soigné la femme, soudoyer le commandant en lui offrant une édition rare de « La divine Comédie », ces propositions ou initiatives échouent. Ils passent alors à la vitesse supérieure : Max est juif, pourvu qu’il vienne… Et Stern le banquier ? Jean-Paul sait où il se cache. L’une des deux femmes présentes pourrait peut-être se dévouer… Les idées s’enchaînent, guidées par la terreur. Chacun se dévoile peu à peu. La réflexion d’André «je préfère être un nazi vivant qu’un français mort» est éloquente. Le repas des fauves est lancé.
Si Vahé Katcha possède l’art d’imaginer les ressources auxquelles un être humain a recours pour éviter le peloton d’exécution, Julien Sibre excelle à distiller l’angoisse qui s’empare des personnages à mesure que le temps s’achemine vers la redoutable décision.
Entre rires nerveux et indignation, le public suit, médusé, les dialogues ciselés, tout à fait glaçants, restitués par des comédiens de haut vol. A voir absolument. M-P P. Théâtre Hébertot 17e.


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