12 HOMMES EN COLÈRE

Article publié dans la Lettre n° 442
du 22 novembre 2017


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12 HOMMES EN COLÈRE de Reginald Rose. Adaptation française Francis Lombrail. Mise en scène Charles Torjman avec Jeoffrey Bourdenet, Antoine Courtray, Philippe Crubezy, Olivier Cruveiller, Adel Djemaï, Christian Drillaud, Claude Guedj, Roch Leibovici, Pierre-Alain Leleu, Francis Lombrail, Pascal Ternisien, Bruno Wolkowitch.
Tout est réuni pour condamner à mort sans délai l’adolescent de seize ans accusé de parricide. L’épouvantable chaleur qui règne dans la salle des délibérations sans air conditionné dont on a condamné la fenêtre et la perspective d’un match de base-ball à ne pas manquer entre Boston et New-York à 20h00 pressent les douze jurés à en finir le plus vite possible. Ils sont convaincus de la culpabilité du jeune qui assure avoir perdu l’arme du crime, un couteau à cran d’arrêt acheté l’après-midi même. Son alibi ne tient pas. Personne ne l’a vu entrer dans le cinéma où il dit s’être rendu et il ne s’est pas souvenu du titre du film et du nom des acteurs lors de son premier interrogatoire sur les lieux du crime. Pour comble, le voisin du dessous jure qu’il l’a entendu menacer son père de mort, tout comme il est certain de l’avoir vu dégringoler l’escalier de l’immeuble juste après le meurtre. Dans l’immeuble d’en face, une femme a vu l’assassin lever le couteau au travers de la vitre du métro aérien qui passait alors et l’a reconnu. Inutile de pousser plus loin la discussion, l’affaire est dans le sac.
Mais l’usage est de voter d’abord la culpabilité, et ce vote doit être unanime. Contre toute attente, le juré numéro 8 vote non coupable. Il lui est impossible d’envoyer un gosse de 16 ans à la chaise électrique sans être certain de sa culpabilité. Furieux, les onze jurés s’insurgent. Le juré n°8 argumente et demande un nouveau vote en faisant une proposition. Si les onze jurés votent tous coupable, il se ralliera à leur décision. Un deuxième juré vote non coupable, les dix autres explosent de rage. Il reste une heure avant le match pour relever les faiblesses de la défense et reconsidérer les charges qui pèsent sur l’accusé. Le juré n°8 s’attelle à la tâche et, faisant fi de l’animosité ambiante, démonte les unes après les autres les charges qui servent à l’accusation, ébranlant ainsi les certitudes des jurés…
La pièce de Reginald Rose écrite en 1953, adapté quatre ans plus tard par Sydney Lumet avec Henri Fonda dans le rôle du juré n°8, est une œuvre mondialement connue, au sujet intemporel et universel. La façon dont est rendue la justice atteint ici ses limites : une enquête bâclée, trop vite orientée sur la culpabilité d’un jeune né dans une banlieue difficile, battu depuis le plus jeune âge par un père alcoolique et très mauvais citoyen. Un avocat commis d’office loin de faire le poids, des témoins peu fiables cherchant à sortir de l’anonymat. Le sort du garçon est dans les mains de douze hommes ordinaires, aux origines très différentes. Ils réagissent selon leur éducation, leur propre vécu et surtout leurs préjugés. Leur réflexion est parasitée par les deux éléments extérieurs, la chaleur accablante et la frustration d’être peut-être privé d’un match. L’alchimie entre tous ces éléments crée l’intensité du huis clos. La scène, pas assez grande pour douze comédiens toujours présents, limite leurs allées et venues. Mais la mise en scène, entièrement concentrée sur les dialogues, permet à la démonstration de l’auteur de garder toute sa puissance. M-P.P. Théâtre Hébertot 17e.


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