LE HORLA

Article publié dans la Lettre n° 420
du 27 mars 2017


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LE HORLA de Guy de Maupassant. Mise en scène Slimane Kacioui avec Florent Aumaître.
Un homme évoque la tiédeur printanière, sa maison charmante, des bateaux qui passent langoureusement sur la Seine toute proche, le trois-mâts comme un grand oiseau blanc. Dans ce paysage idyllique, une première ombre, les sensations en délicatesse, la fièvre qui s’invite, un doute qui assaille, l’humeur s’est modifiée sans raison. Dans « ce sommeil perfide, caché près de moi », une présence insistante cherche à étrangler le narrateur. Ainsi s’inaugure une lente descente aux enfers de la folie, zébrée de rémissions de courte durée, d’échappées vers la ville ou vers le lieu de recueillement, ailleurs, loin. Le journal en soliloque raconte les tentatives avortées pour se désengluer de cette succion de vie, une fébrilité croissante entre cauchemar et veille de moins en moins distincts. Les carafes se vident sans soif, l’hypnose de la cousine s’assortit d’étranges sollicitations, les hallucinations se font pressantes dans une temporalité qui prend une étrange élasticité. Le « malaise inexplicable » oppresse le souffle, questions et exclamations se conjuguent, haletantes, avec les prières angoissées à une divinité peut-être salvatrice. Le 19 août s’étire étrangement, s’enferrant dans la décision de tuer le Horla enfin nommé. Nulle serrure, nulle porte blindée ne viendront protéger de l’instinct de destruction, jusqu’au flamboiement final. Sur les cendres bien réelles de la maison, il ne reste rien, sinon le suicide.
De ce récit haletant de Maupassant, aux accents presque autobiographiques, Florent Aumaître fait une magistrale interprétation, visuelle, sensitive, sensuelle. Communicative en chacune de ses étapes, de ses ensevelissements vers le non-retour de la dépersonnalisation mortifère.
Sur scène, une chaise, un tréteau. Des mises en lumière variées, halos joyeux de plus en plus resserrés, étranglés eux aussi, jusqu’au rouge de feu. Rien de plus n’est nécessaire que ce veston endossé et réendossé fébrilement, tant est palpable la fluidité en accélération du propos, l’évocation des situations et des personnages divers.
Le trois-mâts s’éloigne paresseusement, l’épouvante s’est installée… A.D. Théâtre Michel 8e.


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