FRANÇOIS D’ASSISE

Article publié dans la Lettre n° 458
du 4 juillet 2018


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FRANÇOIS D’ASSISE de Joseph Delteil. Adaptation Adel Akim et Robert Bouvier. Mise en scène Adel Akim avec Robert Bouvier.
La joie parfaite… celle qui habite François d’Assise, celui que l’on dira saint, mais qui est avant tout un homme pétri d’humanité, dans les désirs et le parcours d’une vie d’homme. Tout simplement. Joseph Delteil, qui écrivit le roman dont est adaptée cette mise en scène, se disait tout chargé de messes et de raisin, écrivant lentement, à la fortune du mot. Il écrivait encore : « J’aimerais que le dernier mot soit le même que le premier, le seul mot dont je rêve pour mon épitaphe « innocent »».
Le spectacle joué par Robert Bouvier et mis en scène par Adel Akim en est une magnifique illustration. Ce François d’Assise qu’ils nous donnent à déguster est merveilleusement païen au meilleur sens du terme, plein de verve luxuriante, de mots goûteux en bouche. Et François au soir de sa vie - au matin de sa nouvelle aventure de la mort, aurait-on envie de dire - sourit, la bouche pleine de frangipane, cette délicieuse friandise qui a accompagné et comme caractérisé toute sa vie.
Après une naissance émerveillée à la pluralité du monde, François, jeune homme paillard et affamé de vie, fait prisonnier dans la guerre qui oppose Assise à Pérouse, sera racheté par son riche drapier de père. François tombe fou d’amour au premier regard qu’il porte sur la lumineuse Claire qui marchera dans ses pas jusqu’à la mort. Scène incroyablement irradiée de grâce au cours de laquelle il coupe mèche à mèche l’opulente chevelure de son aimée à qui il va remettre l’austère bure des moniales.
François, le saint des images et histoires pieuses qui se sont emparées de lui et de sa vie édifiante, François fondateur sans l’avoir voulu d’une foule d’ordres monastiques et séculiers qui se sont réclamés de son exemple, et dont il regrette et redoute la multiplication galvaudeuse et les inévitables luttes intestines.
Seul en scène, Robert Bouvier ne campe pas un personnage, il est François d’Assise, dans sa boulimie du monde et des myriades de merveilles de la Création, cet innocent jubilatoire qui cherche en tout la joie parfaite, seule génératrice d’une vie à la hauteur de la beauté du monde. Une existence humble qui n’a cure des fastes ostentatoires, dans la nudité et le dépouillement, mais dans une osmose quasi panthéiste avec le flux de la vie dans tous ses dons. Robert Bouvier est habité par cette figure haute en couleurs joyeuses, il irradie cette lumière intérieure et, même au cœur des épreuves contraignantes, le sourire ne quitte pas ses lèvres. Seul dans un espace qu’il occupe dans une remarquable diversité de gestes et de tonalités verbales, les pieds nus dans l’humus et le champ de blé, il rend pleine et efficace la mise en scène de son joyeux complice Adel Akim, toute de clair-obscur et de floraison vitale. Comment résister à l’appel de cette roborative contemplation ? La joie parfaite est à portée de théâtre, si simple, si évidente. A.D. Théâtre Poche-Montparnasse 6e.

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