LES CHATOUILLES
ou la danse de la colère

Article publié dans la Lettre n° 392
du 8 février 2016


LES CHATOUILLES ou la danse de la colère d’Andréa Bescond. Mise en scène Éric Métayer avec Andréa Bescond.
L’existence d’un enfant violé suit toujours le même processus. Abusé par un adulte, incapable de dénoncer son bourreau, il se tait et tente d’occulter son drame durant des années jusqu’au jour où, n’en pouvant plus, il dévoile l’inconcevable afin de pouvoir enfin se reconstruire. Il se heurte la plupart du temps à l’aveuglement de l’entourage qui ne veut pas comprendre les raisons d’un comportement pas toujours normal, puis son déni, quand, plus tard, il dénonce l’acte criminel.
Odile a huit ans lorsque Gérard, un ami de la famille, lui propose de jouer à la poupée et de se faire des chatouilles. C’est le début d’un calvaire qui va durer des années durant lesquelles la fillette, muette de peur et de dégoût, se laisse souiller sans oser crier la vérité. Elle tente de supporter l’enfer des assauts répétés en se rejetant sur la danse, une expression corporelle qu’elle a découverte à trois ans et dont elle se sert pour mimer avec son corps ce qu’elle ne peut confier verbalement. Exutoire pour continuer de vivre, Odile danse pour exprimer sa détresse mais personne ne comprend le message qu’elle veut délivrer. Ses rêves de danseuse étoile brisés dans l’œuf, elle fait de la danse son métier et affronte alors un autre combat. Pour gagner sa vie, elle met son orgueil dans sa poche et accepte des contrats débiles ou avilissants, aux cachets misérables.
Des séances chez une psychiatre sont le réceptacle du récit. Andréa Bescond interprète les rôles de tous les personnages qu’elle convoque. Elle se fond dans l’enfer de la petite Odile, poignante lorsqu’elle rappelle les viols et son témoignage au procès, grinçante lorsqu’elle raconte son arrivée à l’internat ou l’entrevue avec l’inspecteur de police qui prend sa déposition, drôle lorsqu’elle narre certaines répétitions de danse, irrésistible lorsqu’elle imite Manu, le copain « zarbi ». Andréa Bescond danse, parle, rit, pleure face à un public médusé qui ne sort pas indemne de son éprouvante « thérapie ». Petit Montparnasse 14e.

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