KIMONO
Au bonheur des dames

Article publié dans la Lettre n° 418
du 13 mars 2017


 
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KIMONO. Au bonheur des dames. Le sous-titre fait référence au célèbre roman d’Emile Zola décrivant l’ascension fulgurante des grandes entreprises commerciales et la disparition du petit commerce à la fin du 19e siècle. A la même époque, après les guerres intestines entre seigneurs, le Japon vit une période apaisée tout en étant fermé aux influences orientales. La Maison Matsuzakaya, fondée en 1611, au début de l’époque d’Edo, ancien nom de Tokyo, fabrique alors de somptueux vêtements qui ont fait sa renommée. Nous pouvons en admirer quelques-uns dans cette exposition qui rassemble pas moins de 150 pièces, les plus fragiles étant remplacées par d’autres en cours d’exposition pour ménager leurs coloris.
Le parcours est avant tout chronologique. Après une brève introduction sur l’origine du kimono et la présentation de la Maison Matsuzakaya, il commence avec l’époque Edo (1603-1868). Aucun vêtement ancien mais des paravents montrant, en particulier, des kimonos suspendus sur des supports horizontaux, illustration d’une coutume permettant de faire état de sa richesse.
La section suivante est consacrée à la confection d’un kimono. Inchangée depuis son invention, la réalisation d’un kimono est immuable. Dans un rouleau de tissu de 35 cm de large, sept bandes droites sont découpées puis assemblées les unes aux autres, sans jamais être découpées. Les parties qui dépassent sont repliées pour former les bordures de l’ouverture du vêtement ou des manches. Le vêtement est d’autant plus rigide qu’il est fermé par une ceinture (obi). Cet assemblage caractérise l’esthétique japonaise.
Sur cette séquence de volumes parfaits se déploient de somptueuses décorations. Associés à la matière du tissu, la soie étant la plus coûteuse, les motifs font toute la différence d’un kimono à un autre. C’est l’objet de la section suivante consacrée aux décors du kimono. Les techniques utilisées sont nombreuses. Les artisans collent sur le tissu des broderies, des fils d’or, des feuilles de métal, etc. contribuant à créer un effet de relief. Le tissu lui-même est teint en réservant parfois des zones permettant de créer des dessins.
Le mot kimono est utilisé à partir du 19e siècle pour désigner tous ces vêtements en forme de T, réalisés sans souci du sexe. Il recouvre cinq sortes de vêtements : le Furisode, un kimono à manches longues, jusqu’à 1,25 mètre ; l’Hitoe, un vêtement en soie, sans doublure, porté l’été ; le Kosode (« petite manche »), vêtement aux manches courtes pourvu d’ouvertures étroites pour les mains ; le Katabira, vêtement en lin, sans doublure, porté l’été et l’Uchikake, costume lourd et ample en soie porté au-dessus du kosode ou du furisode, sans obi. Kosode était le terme désignant un kimono avant le 19e siècle.
Le mariage était un évènement important de la vie des femmes au Japon. A cette occasion elles portaient des kimonos en soie damassée avec des motifs de bon augure (pin, bambou, fleurs de prunier ou de mandarinier, grues, tortues, papillons, livres, etc.). Deux exemplaires sont présentés ici à côté d’un extrait du trousseau (konrei dogu) que la jeune mariée apportait dans sa nouvelle demeure. Dans les classes aisées c’étaient des centaines de meubles luxueux fabriqués en laque maki-e (poudre d’or, d’argent, sur fond en laque) qui composaient le konrei dogu !
Nous avons vu que le kimono était fermé par une ceinture. Celle-ci, d’une largeur elle-aussi de 35 cm, pouvait mesurer jusqu’à 5 mètres pour les femmes. Cet accessoire, qui contraint le corps comme un corset, était noué. On compte plusieurs centaines de manières de le nouer ! Les femmes japonaises portaient les cheveux longs jusqu’à la seconde moitié du 16e siècle. A l’époque d’Edo, elles commencent à relever leurs cheveux. Apparaissent alors de nouveaux accessoires : les peignes et les épingles de décoration, qui rivalisent d’originalité (on voit ainsi une épingle avec une boussole !).
La partie historique de l’exposition se termine avec des kimonos décorés de thèmes emblématiques, s’inspirant des paysages japonais popularisés par l’estampe, comme les Huit vues d’Omi ou les Vues célèbres de Kyoto, accompagnés de calligraphie.
Changement de décor avec les trois dernières sections. La première nous montre la mode japonaise au 20e siècle. Nous voyons comment les créateurs japonais comme Kenzo (Kenzo Takada) et Junko Koshino ont revisité l’art du kimono pour en faire des vêtements faciles à porter en toute saison.
Lors de l’exposition universelle de 1867 le Japon est présent, pour la première fois. Les visiteurs sont fascinés par ces vêtements et surtout par les étoffes, ce qui donne lieu au Japonisme. Les peintres s’emparent du kimono, en faisant un objet de fantasme comme le montre le tableau de James Tissot, La Japonaise au bain (1864), exposé à côté d’un kimono au motif similaire à celui du tableau. Les grands couturiers français comme Paul Poiret et Madeleine Vionnet s’inspirent aussi du kimono pour créer des robes ouvertes devant, mais sans la ceinture-corset.
Après une période d’interruption à partir des années 1970,  la haute couture française s’inspire de nouveau du kimono en créant des robes somptueuses signées Yves Saint Laurent (1994), Jean Paul Gaultier (2002), John Galliano (2007) ou Franck Sorbier (2008). Une exposition intéressante et spectaculaire se terminant sur une collection de mode. R.P. Musée national des arts asiatiques - Guimet 16e. Jusqu’au 22 mai 2017. Lien : www.guimet.fr.


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