CHEFS-D’ŒUVRE D’AFRIQUE
dans les collections du musée Dapper

Article publié dans la Lettre n° 393
le 29 février 2016

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CHEFS-D’ŒUVRE D’AFRIQUE dans les collections du musée Dapper. Fondé en 1986 par Michel Leveau (1930-2012), un polytechnicien qui avait pour ambition de faire changer le regard sur les arts africains, le musée Dapper présente un ensemble d’œuvres exceptionnelles qui sont, pour bon nombre d’entre elles, des références incontournables des arts africains et n’ont aucun équivalent dans le monde, que ce soit au sein de collections publiques que privées. Cette institution a déjà organisé une cinquantaine d’expositions - nous avons rendu compte des plus récentes - mais c’était avec des objets provenant de prêts. Cette fois, les 130 œuvres exposées proviennent toutes du fonds du musée, dont on mesure ainsi la richesse et la diversité.
L’exposition est organisée en deux grandes sections, Afrique centrale et Afrique de l’Ouest, à l’intérieur desquelles les œuvres sont regroupées selon leur fonction et leur proximité stylistique. Le parcours commence par le culte des ancêtres en Afrique centrale avec tout d’abord des figures de reliquaire provenant du Gabon et du Congo et divers objets de pouvoir telles que ces statuettes nkisi dotées de charges « magiques », que seuls les officiants des cultes (nganga) pouvaient manipuler, ou encore ce masque-heaume bwoom qui garantissait le « bien-être » du roi. On le voit, ces objets se trouvent fréquemment à la croisée du politique et du religieux et n’ont pas de vocation purement décorative malgré leur beauté intrinsèque. Cette section propose aussi un grand nombre de masques de toutes sortes (masques blancs, masques-cimier, masques-heaume, etc.), des statuettes, des figures avec « manche », des armes (haches cérémonielles, couteaux), des sièges et appuis-tête magnifiquement sculptés, des amulettes en ivoire, des coiffes fabriquées avec des cauris puis, plus tard, avec des boutons de chemise en nacre, une harpe et même des tissus veloutés en fibres de palmier raphia.
Dans la seconde partie, nous trouvons tout d’abord les objets les plus anciens connus, dont une statue-autel, vraisemblablement fichée dans le sol, remontant au Xe siècle (datation au carbone 14) et provenant du « pays dogon » (Mali). On y voit aussi une étonnante figure équestre (XVIe-XVIIIe siècle), des statuettes d’hommes ou de femmes, parfois même en couples, et divers objets éducatifs et ludiques tels des masques ntomo qui se caractérisent par une rangée de cornes dont le nombre caractérise le sexe de l’objet (mâle, femelle ou androgyne). Tous ces objets proviennent du « pays dogon », peut-être le plus fertile dans l’art africain.
Les objets suivants proviennent de Côte d’Ivoire, du Bénin et du Ghana. Du premier, nous voyons un magnifique jeu d’awalé et toutes sortes de masques aux yeux mi-clos ou exorbités. Ces masques sont les gardiens et les formateurs des initiés, les instruments pour conjurer les forces hostiles et pour accompagner les défunts. Du Bénin, nous pouvons admirer des pièces provenant de l’ancien « trésor du roi Béhanzin », dont un lion en bois et argent et une statue en bronze haute de 105 cm, représentant le roi Glèlè brandissant des armes, attributs de son pouvoir, réalisée avant 1889. Du Ghana enfin, qui a rayonné durant des siècles grâce au commerce des esclaves et de l’or, proviennent de nombreux bijoux en or, dont un magnifique disque pectoral du XVIIIe siècle, une épingle à cheveux, un peigne, un collier, des bagues, etc. À côté de ces objets qui incarnaient le pouvoir politique et spirituel, des têtes sculptées en terre cuite, d’une grande finesse, permettaient de conserver les traits magnifiés des figures ancestrales honorées lors des rituels funéraires.
Une très belle exposition qui permet aux visiteurs, même néophytes, de saisir aisément les grands principes de base sur lesquels se fondent les arts traditionnels africains, grâce à des panneaux d’une grande clarté et des cartels très lisibles. Musée Dapper 16e. Prolongée jusqu’au 17 juin 2017. Lien : www.dapper.fr.


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