BEAU DOUBLÉ, MONSIEUR LE MARQUIS !
Sophie Calle et son invitée Serena Carone

Article publié dans le supplément à la Lettre n° 447
du 7 février 2018


 
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BEAU DOUBLÉ, MONSIEUR LE MARQUIS ! Sophie Calle et son invitée Serena Carone. Le Musée de la Chasse et de la Nature a proposé à Sophie Calle d’investir ses murs, au milieu des collections permanentes. À son tour, cette dernière a invité son amie Serena Carone, sculpteur, qui expose quelques-unes de ses œuvres réalisées au cours des vingt dernières années.
Sophie Calle, née en 1953, se fait remarquer en 1980 avec Les Dormeurs, des gens qu’elle invite à dormir quelques-heures dans son lit, sans discontinuer pendant huit jours, qu’elle photographie tout en prenant des notes sur leur sommeil. Elle continue ainsi en utilisant divers supports, la photographie bien sûr, mais aussi le livre, la vidéo, le film, la performance, etc. Ici nous avons plutôt affaire à une installation à travers tout le musée, où elle présente quelques-unes de ses œuvres passées, suivie d’une exposition de ses derniers travaux. C’est en quelque sorte la continuation de la rétrospective de 2003-2004, M'as-tu vue, au Centre Pompidou.
L’œuvre de Sophie Calle interroge la limite poreuse entre sphère publique et sphère privée et le caractère interchangeable des positions du voyeur et de l’exhibitionniste. Elle avait commencé sa carrière d’artiste en suivant des inconnus dans Paris et même à Venise où l’un d’entre eux s’était ensuite rendu. Plus tard, elle avait demandé à sa mère de prendre un détective privé pour la faire suivre à son tour et à son insu. Cela donna lieu à des expositions, telle que Suite Vénitienne (1980) dont une sélection est présentée ici.
Parmi ses œuvres anciennes, elle présente Dommages collatéraux. Cœur de cible (1990-2003), portraits de délinquants fichés, utilisés comme cible pour l’entraînement des policiers d’une ville des États-Unis et une sélection de Liberté surveillée (2014), des photos d’animaux franchissant les autoroutes par les passages qui leur sont aménagés. Mais le plus intéressant sont ces 38 petits textes d’Histoires vraies (1988-2003), des récits d’histoires qu’elle a vécues, présentés dans des cadres fantaisie avec des objets en rapport avec le texte : un soutien-gorge avec Les Seins miraculeux, un peignoir avec Le Peignoir, un dessin de nu lacéré et recollé avec La Lame de rasoir, etc.
Ses créations de 2017 sont nombreuses. Il y a d’abord le long texte sur l’Ours, l’emblème du musée, qu’elle a recouvert d’un drap qui le cache intégralement ! Ce texte a été écrit à partir des témoignages du personnel du musée et de quelques visiteurs. Il y a Fathers, sept photos de ce qui pourrait être des tombes avec le mot « Father » écrit dessus et aussi deux photos, Souris et Le Fantôme de Souris, du nom de son chat, qui est mort. Au deuxième étage, outre la Suite Vénitienne mentionnée plus haut, nous avons À l’espère, un ensemble de 21 photographies couleur avec texte. Les photos représentent du mobilier favorisant l’attente (banc, chaise …). Les textes sont des messages amoureux empruntant au vocabulaire de la chasse et du monde animalier, tel que « TGV Paris-Arcachon. Rat des villes très amusé par conversation rat des champs. À bientôt sur terrain neutre ? 06… ». Son dernier travail est une compilation par thème (« Goûts simples, bonne santé », « Gentille, même infirme » et même « Pas prise de tête » !) de petites annonces de rencontre du Chasseur français (de 1895 à 2010) et de quelques autres medias, présentées sur de grands panneaux. Un régal !
De son côté, Serena Carone a disposé le long du parcours diverses œuvres telles que Vierge de la patience (1997), Poulet (2000), Tête de porc (2000), Tête de veau (2000), 5 pistolets (2005 à 2008), Cent chauves-souris (2012), Rêveuse (2014), Saumons (2015), Lièvre chasseur (2016), et trois sculptures impressionnantes, Ours (2016), une peau d’ours blanc à poser sur le sol, Mon amie (2016), un poulpe, et Deuil pour deuil (2017), toutes trois en faïence émaillée. La dernière sculpture représente Sophie Calle, grandeur nature, à la manière des gisants des tombeaux étrusques. Cette dernière l’a accompagnée d’un texte intitulé Mes Morts et l’a entourée d’animaux naturalisés de sa collection particulière (cou de girafe, bébé zèbre, tigre, etc.). Une exposition variée et distrayante, mélancolique et fantastique, qui ne laissera pas les visiteurs indifférents. R.P. Musée de la Chasse et de la Nature 3e. Jusqu’au 11 février 2018. Lien : www.fondationfrancoissommer.org.


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